le patriote n° 1089 du 17/04/03

POLITIQUE

Dernières passations des charges
Quatre ministres du MPCI ont pris fonction hier

Les dernières passations des charges entre les ministres sortants et la dernière vague des ministres des Forces nouvelles ont eu lieu hier mercredi à la Caistab au Plateau. Les dispositions sécuritaires ont été un peu plus renforcées. C'est à 10h30 précises que les quatre ministres sont arrivés dans les locaux du bâtiment sous forte escorte des soldats de la CEDEAO et de la Force "Licorne". Le ministre d'Etat, ministre de la Communication, Guillaume Soro, avait à ses côtés ses collègues Michel Gueu (Sports et Loisirs), Tuo Fozié (Jeunesse et Culture civique) et Koné Messamba (Victimes de guerre, exilés et déplacés).
Pour la circonstance, ces trois chefs militaires du MPCI ont troqué leurs treillis contre des costumes. La passation des charges la plus attendue était sans nul doute, celle du ministère de la Communication. Et pour cause ! Le Secrétaire général du MPCI prenait officiellement fonction. Le Secrétaire général du gouvernement qui officiait la cérémonie, était installé entre Guillaume Soro et Séry Bailly. L'élève et le maître. "Je voudrais saluer avec déférence, le Pr Séry Bailly, grand homme de lettres et éminent professeur pour qui j'ai une grande estime. Un homme qui fut mon maître. Je n'oublierai pas ces échanges et discussions empreints de cordialité que nous avons eus à l'époque lorsque j'étais encore votre étudiant", débute Guillaume Soro dans un discours dans lequel il rappelle à la presse toutes tendances confondues que "la réconciliation ne peut s'accommoder de bruits inutiles". "Qu'on ne vous surprenne plus à persévérer dans le mensonge, l'intransigeance, l'intolérance et le radicalisme inconscient. Faites preuve de professionnalisme, de maturité et de responsabilité", lance-t-il aux journalistes. Cependant, il a promis aux hommes de presse, l'amélioration de leurs conditions de vie et de travail ainsi que la dépénalisation des délits de presse sans oublier la libéralisation de l'audiovisuel.
Par ailleurs, le Secrétaire général du MPCI a demandé l'application de l'Accord de Marcoussis dans son esprit et à la lettre. "(...) Pour nous, l'accord signé à Paris est ce qu'il y a de mieux pour la paix en Côte d'Ivoire", a ajouté Guillaume Soro.
Auparavant, "le maître", Séry Bailly, a fait l'état des lieux tout en disant sa fierté de voir son "élève" lui succéder.
Pendant ce temps, juste dans la salle voisine, le ministre Tuo Fozié se faisait remettre les dossiers du ministère de la Jeunesse et de la Culture civique par son prédécesseur, Lazare Koffi Koffi. Le ministre MPCI qui a tenu à remercier son "grand frère" a promis de rester à l'écoute de la Jeunesse ivoirienne, fer de lance de l'avenir du pays.
Quant à Michel Gueu, à qui François Amichia passait le relais au département des Sports, il a rendu un vibrant hommage à son prédécesseur. D'ailleurs, il a promis, dans les semaines à venir, un tournoi portant le nom du ministre Amichia. Dans son intervention, le nouveau ministre des Sports a appelé à l'union des filles et fils du pays, à faire table rase du passé et à se tourner résolument vers le futur.
Après les différentes passations des charges, les quatre ministres du MPCI ont regagné l'hôtel dans lequel ils sont logés avec les cinq premiers Roger Banchi, Issa Diakité, Yssouf Soumahoro, Dosso Moussa, Koné Mamadou présents à Abidjan depuis dimanche dernier.

Yves M. Abiet


Traits d'esprits
La secte, en avant...

Le pays s'écroule. Le mal a été diagnostiqué. A Marcoussis. Mais, la Refondation veut tout mettre. A la trappe. Pour une fois. La secte se révolte. "Il faut réviser la Constitution. Stopper le processus d'identification. Bannir l'appellation première Dame". Révolution de la secte ? Trop tôt pour le dire. Mais cette prise de position bouscule les habitudes. Les sceptiques ne désarment pas. Avec la secte, on ne sait jamais. Disent-ils. Alors, prudence !

Al Séni


Condamné avant d'être jugé

"Beaucoup de gens ont dit que j'ai tué Guéi. Je ne dis rien parce que notre pays est en guerre et parce que également je veux la vérité". Ces propos sont de Laurent Gbagbo. Il les a lâchés lundi dernier, lors de sa rencontre avec les populations Dan. Il a évoqué ce problème très sensible, avec le style emphatique qui lui est si usuel lorsqu'il se trouve quelque peu dans l'embarras. "Guéi ne peut pas mourir comme ça", s'est-il même surpris à s'indigner sur l'assassinat de l'ancien chef d'Etat. Il ne restait plus à l'époux de Simone qu'à essayer de raboter les angles de son embarras en promettant pour l'illustre défunt des funérailles grandioses, dignes de son rang. Mais surtout en envisageant la mise en place d'une commission d'enquête pour élucider les circonstances du drame.
Sans remuer le couteau de cette tragédie dans la plaie encore sanguinolente des Ivoiriens, l'honnêteté intellectuelle et le devoir de mémoire commandent que soit restituée un tant soit peu l'histoire - trop récente pour subir déjà des déformations - des premières heures chaudes qui ont emporté le Général Robert Guéi et dix-neuf membres de sa famille dont son épouse.
En tout cas, tous ceux qui ont suivi ces événements savent au moins que dès les premières heures, c'est bien le Premier ministre d'alors, Pascal Affi N'Guessan qui, le premier, sur les antennes d'une radio étrangère , a déclaré sans ambages que le Général Guéi était le commanditaire de l'attaque. Il l'a déclaré avec d'autant plus de conviction qu'il a été relayé, dans les instants qui ont suivi, par son ministre de la Défense qui, révélant avoir lui-même échappé à un assassinat, confirmait l'implication de Guéi. Mieux (ou pis), un peu plus tard, lorsque l'assassinat du président de l'UDPCI sera annoncé, c'est bien l' un d' entre ces deux dignitaires qui affirmera que l'ancien président de la transition militaire a été tué sur le champ de bataille. C'est-à-dire, que, selon la version des patrons du régime (en l'absence du Président Gbagbo), l'ex-président du CNSP, tout Général qu'il était, a fait fi de son rang d'officier général, ordinairement astreint aux tâches tactico-stratégiques, pour prendre la kalachnikov et se jeter aux devants de ses troupes pour livrer bataille. Certainement instruit de cette version par ses collaborateurs, le Président Gbagbo, lui-même, depuis l'Italie où il était en visite officielle, avait parlé de "puchiste" et "politicien véreux qui veulent prendre des raccourcis". La télévision nationale, pour sa part, n'a pas été en reste. Elle a montré sous tous les angles, les images d'un Guéi Robert criblé de balles gisant sur le bas-côté d'une ruelle d'Abidjan. Qui donc s'est rendu coupable de ce crime ? On veut bien savoir la vérité. Mais Guéi Robert n'avait-t-il pas déjà été jugé, condamné avant d'être exécuté le 19 septembre ?
La commission d'enquête nous le dira.

Koré Emmanuel


Soro Guillaume (ministre d'Etat, ministre de la Communication) :
"C'est la presse qui a inoculé le virus de la division en Côte d'Ivoire"

Lors de votre prise de fonction, vous releviez des dérives dans la presse auxquelles il va falloir mettre fin.

Soro Guillaume : Il y a des dérives que nous avons constatées avant la crise. Ces dérives ont engendré des problèmes que nous allons nous atteler à corriger. Marcoussis a reconnu qu'il y avait effectivement des problèmes avec notre presse. Elle véhiculait la haine etc. Marcoussis a défini un programme et c'est ce programme que le ministre va s'atteler à appliquer.

Vous êtes dans le gouvernement, et il y a des bombardements des forces régulières dans les zones que vous contrôlez. Qu'est-ce qui explique cela ?

S.G : Nous sommes à la passation des charges parce que nous avons à prendre notre poste dans ce gouvernement. Ce qui se passe dans l'Ouest est totalement regrettable. Nous le dénonçons vigoureusement. Il faut aussi comprendre que cela peut être le fait de quelques radicaux qui ont de la difficulté à maîtriser le nouvel environnement et qui veulent entraver la réconciliation. C'est pourquoi j'ai dit, dans mon message, qu'il faut un courage politique et de la persévérance pour que la réconciliation puisse être réalisée en Côte d'Ivoire.

Vous dénoncez cela en tant que Secrétaire général du MPCI ou en tant que membre du gouvernement ?

S.G : Ecoutez, je viens de faire la passation des charges. Je suis Secrétaire général du mouvement. Autant l'ex-Premier ministre était président d'un parti et Premier ministre, autant je suis aujourd'hui ministre et Secrétaire général du MPCI. Je ne peux que dénoncer les choses au nom de mon organisation.

Etes-vous satisfait aujourd'hui au plan de la sécurité ?

S.G : Maintenant, la sécurité est assurée par la force "Licorne" et l'Ecoforce. Nous n'avons pas de raisons, dans le contexte de réconciliation, de craindre quoique ce soit. Je l'ai déjà déclaré, il faut du courage et nous sommes venus prendre nos fonctions. Nous allons travailler à la réalisation de la réconciliation nationale.

Pensez-vous que les Ivoiriens sont prêts à pardonner aujourd'hui tout ce qui s'est passé ?

S.G : Ecoutez, parlant d'Ivoiriens, il n'y a pas les ivoiriens d'un côté et nous de l'autre côté. Nous sommes des Ivoiriens. C'est ensemble que nous allons nous pardonner. Autant on peut reprocher des choses à tel camp, on peut le faire, également pour l'autre camp. La vraie réconciliation, c'est cela. Que les deux camps reconnaissent leur tort et aillent au pardon.

Est-ce que vous allez vous repentir ?

S.G : La presse a beaucoup à faire dans ce sens-là. Elle doit se repentir. Parce que c'est elle qui a inoculé le venin de la division en Côte d'Ivoire.



Michel Gueu (ministre des Sports) :
" regardons vers l'avenir pour le bonheur de notre mère Patrie"

"Je voudrais saisir l'occasion qui m'est offerte pour transformer cette cérémonie protocolaire de passation des charges en une fête de famille. J'allais dire une fête de retrouvailles, mais aussi un temps de pardon réciproque. Notre pays, il est vrai, traverse des périodes difficiles. Tous ces faits font partie de l'histoire d'une Nation. La nôtre, il faut chercher à la circonscrire rapidement. C'est pourquoi, je crois, humblement qu'il est du devoir de chaque Ivoirien et chaque Ivoirienne d'œuvrer activement à la cohésion et à l'union des cœurs. A toutes les filles et à tous les fils de la Côte d'Ivoire, je voudrais dire que c'est en frère et en véritable patriote que je viens vers vous. Le samedi 08 mars dernier, j'annonçais les couleurs depuis Accra lors d'une interview à la fin de la rencontre d'Accra. Je souhaiterais que nous fassions table rase du passé et que nous regardions résolument vers l'avenir pour le bonheur de notre mère patrie. Je voudrais profiter de cet instant solennel pour vous (ndlr, François Amichia, ancien ministre des Sports et des Loisirs) remercier et vous féliciter pour l'immense travail que vous avez abattu à la tête de ce difficile département des Sports et Loisirs. J'espère être à même de suivre les sillons que vous avez tracés. Vous êtes un grand sportif doublé d'un homme intègre. Nous avons suivi votre savoir-faire lorsque vous avez géré le Comité de soutien aux Eléphants. Soyez-en remercié, monsieur le ministre et cher frère. Vous partez, vous n'êtes plus avec nous. Permettez-moi de m'appuyer sur vous, en vous sollicitant, chaque fois que besoin se fera sentir. J'envisage organiser, dans les saisons à venir, un tournoi de football doté du trophée François Amichia. Mesdames et messieurs les Directeurs et collaborateurs, des informations me sont parvenues selon lesquelles, je pourrai compter sur votre équipe composée d'hommes expérimentés, compétents et dynamiques. Je souhaite que nous nous mettions les uns à la disposition des autres. Nous sommes condamnés à nous entendre et à nous serrer les coudes pour mener à bon port le bateau Sports et Loisirs.
Mesdames et messieurs les journalistes, vous constituez les piliers de ce département. Je voudrais déjà vous dire que mes collaborateurs et moi sommes à votre entière disposition. C'est pourquoi, nous vous prions de venir à la source avant de lancer toute chose.
Avant de terminer, je tiens à réitérer mes sincères remerciements et ma profonde gratitude au Premier ministre, Seydou Diarra. Vive la Côte d'Ivoire unie dans la paix".
Je vous remercie.

Propos retranscris par Yves M. Abiet
Coll. K.Marras D.



Coulisses

- Dacoury-Tabley à Abidjan

Le chargé des Relations extérieures du MPCI, Dakoury-Tabley a effectué le déplacement dans la capitale ivoirienne, avec les ministres venus pour les passations des charges. L'ancien numéro deux du FPI qui a rallié le MPCI a été aperçu hier à la Caistab. Abondamment sollicité par les nombreux journalistes ivoiriens et étrangers, Dakoury-Tabley n'a pas fait de déclaration.

- Le coup de radio Côte d'Ivoire

C'est un coup de maître qu'a réussi Radio Côte d'Ivoire hier. Située pourtant à quelques mètres seulement du lieu de la passation des charges, Radio Côte d'Ivoire n'a pas fait le déplacement pour la couverture de l'événement. Les reporters sont arrivés sur les lieux à la fin de toutes les passations des charges. Ils ont tout de même recueilli les propos du ministre de la Communication. Pourquoi ce retard ? "C'est maintenant qu'on nous a dit de venir", ont répondu les reporters interrogés.

- Honorat de Yédagne absent

Là où Georges Aboké a fait le déplacement, en sa qualité de Directeur général de la RTI, Honorat de Yédagne, Directeur général de "Fraternité Matin" n'a pas pris la peine d'assister à la passation de charges de son ministre de tutelle, Guillaume Soro. Peut-être, était-il encore occupé à tenir des réunions anti-Soro.

- Les religieux présents

C'est l'une des rares passations des charges à laquelle ont assisté les religieux. Hier, des leaders religieux étaient présents à la cérémonie de passation des charges (la dernière). Ediemou Blin Jacob, responsable local de l'Eglise du Christianisme céleste, l'Imam Koné Idriss Koudouss et d'autres leaders religieux ont honoré de leur présence la cérémonie. Une grande première.

- Sécurité plus renforcée

Depuis le début des passations des charges des ministres des Forces nouvelles, la sécurité est renforcée aux alentours de la Caistab. Elle l'était encore plus hier en raison de la présence de Guillaume Soro et de trois autres ministres issus du MPCI qui prenaient leur fonction. Il fallait, à trois reprises, se soumettre aux fouilles corporelles avant d'avoir accès à la salle.


La guerre se poursuit à l'Ouest
Vavoua bombardé hier, dix morts et quarante blessés

Les troupes gouvernementales sont encore passées à l'offensive hier dans le Centre-Ouest du pays. Après Danané, Zouan-Hounien et Mahapleu , mardi dernier, les hélicoptères MI-24 ont axé leurs frappes sur la ville de Vavoua tenue par Koné Zacharia, le chef des opérations militaires du MPCI dans cette ville.
Le bilan de cette attaque est de dix morts et 41 blessés, selon l'Adjudant Antoine Beugré, Directeur de la Communication du MPCI.
En effet, dans un communiqué émanant du mouvement rebelle, il est indiqué que "ce jour, mercredi 16 avril 2003, les hélicoptères de combats MI-24 ayant décollé de Yamoussoukro ont bombardé le marché de la ville de Vavoua, le poste de gendarmerie et une station d'essence". L'Adjudant Beugré a précisé également que ce bombardement "a déjà fait au moins dix morts et quarante blessés civils au marché, nous poursuivons le décompte, les nombreux blessés ont été transférés à l'hôpital de Séguéla". Du côté des forces loyalistes, on dément cette information. Selon le porte-parole de l'Etat-Major des FANCI, le Lieutenant-Colonel N'Goran Aka, "Les hélicoptères ne sont pas entrés en action". Pourtant, l'ONG "Médecins du monde" et plusieurs autres témoins confirment le raid aérien mené par les hélicoptères gouvernementaux sur la ville de Vavoua, mais, avancent plutôt le bilan d'un mort. Face à cette autre attaque héliportée des troupes loyalistes, l'Organisation des Nations Unies (ONU) réunie déjà mardi a demandé, au gouvernement ivoirien, de cesser ses attaques héliportées contre les villes occupées par les "Forces Nouvelles". Cette attaque sur Vavoua est intervenue au moment où les derniers ministres issus des "Forces Nouvelles" prenaient fonction à Abidjan.

Issa Bamba

Communiqué du MPCI

Dans le communiqué de presse n°36-03 du mardi 15 avril 2003, nous avons fait cas de frappes aériennes contre les localités de Zouan-Hounien, Danané et Mahapleu. Le bilan définitive pourrait alourdir le nombre de personnes tuées, compte-tenu du fait que l'hélicoptère s'est par la suite attaqué au marché de la localité de Mahapleu en tirant sur toute forme humaine.
Ce jour mercredi 16 avril 2003, les hélicoptères de combat MI 24 ayant décollé de Yamoussoukro ont bombardé le marché de la ville de Vavoua, le poste de la gendarmerie et une station d'essence.
En attendant de dresser un bilan de ces massacres, le MPCI tient à faire remarquer que les attaques aériennes de ce mercredi 16 avril 2003 sont les cinquièmes depuis le 08 avril dernier.
Pour mémoire, et au regard des courriers adressés par le Général Bruno Dary au Président du Comité de suivi, les 11 et 14 avril 2003, on enregistre ce qui suit :
- mardi 08 avril 2003 : attaque contre la ville de Danané, 03 morts ;
- jeudi 10 avril 2003 : attaque contre la localité de Sanguinaré, 02 morts, 07 blessés dont 03 femmes et 03 enfants;
- lundi 14 avril 2003 : attaque contre la localité de Zouan-Hounien, 09 morts et 06 blessés ;
- mardi 15 avril 2003 : attaque contre les localités de Zouan-Hounien, Danané (02 morts) et Mahapleu (victimes à déterminer) et de nombreux blessés.
Le MPCI a déjà informé les membres du Comité de Suivi, la MICECI et Licorne.

Fait à Bouaké, le mercredi 16 avril 2003
Pour le MPCI
Le Directeur de la Communication
Antoine Beugré



Visite aux Etats-Unis
ADO séduit les Américains

"Reconstruction de la Côte d'Ivoire : la part de la communauté internationale". Le thème de la conférence publique du leader du RDR le lundi dernier dans la salle de conférence de l'Université Johns Hopkins, sise sur le Massachusetts Avenue, à Washington DC a tenu toutes ses promesses.
Devant un parterre de personnalités composé d'hommes politiques, d'universitaires, de diplomates et de partenaires au développement auxquels se sont naturellement joints de nombreux étudiants de cette prestigieuse université ainsi que les associations intéressées par les droits de l'Homme, le président du RDR et ancien Premier ministre ivoirien s'est longuement exprimé sur la situation qui prévaut dans son pays.
Durant cet exposé, le leader des Républicains a réitéré à l'assistance, ce qu'il avait dit à Donald Payne, Vice-président de la Commission des Affaires africaine du Sénat, le 10 avril dernier. A savoir, la nécessaire implication totale de la communauté internationale dans la résolution du conflit ivoirien. En effet, Alassane Ouattara a estimé qu'en raison des obstacles posés par le pouvoir dans l'application des accords de Marcoussis, la communauté internationale doit exercer une pression de vigilante.
Tant du côté du gouvernement que des Forces nouvelles. "Il faut mettre un terme aux souffrances des Ivoiriens", a plaidé ADO. Avant d'ajouter que la communauté internationale "a le devoir de contraindre les Ivoiriens à la paix".
Avec les bombardements dans les zones de l'Ouest contrôlées par le MPIGO et le MJP, M. Ouattara s'est demandé si réellement Laurent Gbagbo veut appliquer les Accords de Linas Marcoussis.
Cette conférence a permis aux illustres invités de s'imprégner des vraies réalités du terrain et surtout de l'attitude on ne peut plus ambiguë du président ivoirien. En dépit de la désinformation et de la mauvaise foi de l'ambassadeur de Côte d'Ivoire à Washington, le séjour du président du RDR et surtout la communication qu'il a faite à l'Université John Hopkins a été un succès total.
La conférence publique ne s'est jamais tenue a huis clos comme l'a fait croire la représentation diplomatique ivoirienne aux USA. Le président du RDR a réussi à faire déplacer du beau monde en quantité et en qualité. Parmi les personnalités qui participaient à cette conférence, il y avait les ambassadeurs Moos (ancien ministre aux Affaires africaines) et David Shinn (ancien ambassadeur des USA en Ethiopie). On notait également la présence de M. Zartman, (Directeur du Programme des gestions et des conflits) qui est un expert consultant. Les défenseurs des droits de l'Homme n'ont pas manqué à l'appel. Il y avait entre autres, le NDI, l'International Républican Institut, l'African American Institute.
Les structures de défense et de promotion de la démocratie ont effectué le déplacement pour écouter l'un des leaders politiques ivoiriens les mieux placés pour leur dire la vérité sur la crise ivoirienne. A ce titre, la Fondation internationale des systèmes électoraux, African développement fondation for démocratie et the Open society institute sont allés s'imprégner des réalités ivoiriennes.
Malgré ce calendrier politique chargé, Alassane Ouattara a consacré du temps à la vie de son parti et a rencontré les militants de son parti. Il a promis de prendre des contacts privés avec les Institutions financières notamment la Banque mondiale. Il ressort de ces différentes visites au cœur du pouvoir américain que la première puissance mondiale en général et la classe politique en particulier, soutiennent Marcoussis et demandent l'application effective et rigoureuse des Accords.

YMA


Journées de réflexion des députés du PDCI
Le PDCI réclame la révision de la constitution avant mars 2004

Les députés PDCI-RDA étaient lundi et mardi derniers à Bassam pour une table ronde au sortir de laquelle ils ont produit plusieurs résolutions, dont celle relative au planning d'exécution des Acords de Linas-Marcoussis que nous publions ci-dessous.

RESOLUTION RELATIVE AU PLANNING D'EXECUTION DES ACCORDS DE LINAS-MARCOUSSIS

Considérant que les accords de Linas Marcoussis sont reconnus de tous comme la voie de sortie de la crise qui frappe la Côte d'Ivoire depuis le 19 septembre 2002.
Considérant que les populations ivoiriennes ne peuvent continuer de souffrir indéfiniment les affres de cette guerre Considérant que la mise en œuvre rapide des résolutions de la table ronde de Linas Marcoussis est un gage de restauration de la paix,Le groupe parlementaire PDCI-RDA recommande l'exécution des accords de Linas Marcoussis selon le planning suivant :
1° La formation complète et le fonctionnement effectif du Gouvernement de réconciliation nationale avant la fin du mois d'avril 2003
2° Le désarment des rebelles et le cantonnement des forces belligérantes et la prise d'une loi d'Amnistie au mois de mai 2003
3° La libéralisation et la démocratisation immédiate des médias d'Etat
4° La reprise de l'identification des personnes au mois de juin 2003
5° La création de la Commission d'enquête sur les droits de l'homme au mois de juin.
Le redressement économique, le régime électoral, l'éligibilité à la Présidence de la République, le régime, foncier doivent être achevés au plus tard fin mars 2004 pour créer les conditions d'élections transparentes et démocratiques.

RESOLUTION RELATIVE A L'UTILISATION DES MEDIAS D'ETAT

Considérant :
1- La faible qualification, voire l'inexistence de qualification de certains hommes de la presse et des médias nationaux.
2- Le dérapage d'une certaine presse et des médias, préjudiciables à la réconciliation nationale.
3- Le rôle joué par les médias et la presse d'Etat dans la diffusion des idées et la conquête du pouvoir d'Etat
4- Les difficultés financières et économiques réelles de la presse et des médias nationaux, qui les rendent dépendants de certains pouvoirs et groupes de pressions
5- Le niveau d'alphabétisation d'une bonne partie de la population Le groupe parlementaire PDCI- RDA recommande :
1°/ D'affecter une partie des fonds de soutien à la presse et aux médias dans le cadre de la réconciliation nationale, au perfectionnement et au recyclage des hommes de média.
2°/ De donner des moyens juridiques financiers et humains aux organismes de régulation et d'autorégulation des médias : la commission nationale de la presse, le CNCA, l'OLPED, pour jouer pleinement leur rôle de contrôle de l'information.
3°/ En ce qui concerne les médias d'Etat, de mettre tout en œuvre pour assurer pendant cette phase de réconciliation nationale un temps d'antenne équilibré (poids politique) à tous les acteurs politiques concourrant à la formation du suffrage.
4°/ Pour la nomination des cadres dirigeants de la presse et des médias d'Etat, de faire appel à candidature et ces responsables devront prêter serment devant les autorités judiciaires pour leur neutralité.
5°/ La mise en œuvre effective de la proposition du Premier Ministre de réconciliation nationale de doter les organes de presse de moyens financiers afin de les mettre à l'abri de toute tentative de corruption.
6°/ Que des moyens soient mis à la disposition de la société civile pour sensibiliser et former l'esprit critique de la population par rapport aux contenus des informations livrées par la presse et les médias.

Fait à BASSAM, le 15 Avril 2003



Situation de crise en Côte d'Ivoire
L'ONU hausse le ton

Bien que satisfait des progrès réalisés dans la mise en place d'un nouveau gouvernement en Côte d'Ivoire, le Conseil de sécurité a appelé à la cessation immédiate des violences qui portent atteinte au processus de paix et de réconciliation dans le pays.
"Les membres du Conseil ont exprimé leurs préoccupations face aux récentes violations du cessez-le-feu et demandent aux parties de respecter leurs engagements", a indiqué mardi le Président du Conseil pour avril, l'Ambassadeur mexicain Adolfo Aguilar Zinser, dans une déclaration à la presse. "Le Conseil a particulièrement regretté le recours aux mercenaires et autres forces étrangères, ainsi qu'aux recrutements forcés, y compris d'enfants, et demandé aux parties de s'interdire de recourir à de telles pratiques." a-t-il poursuivi.
Le président du Conseil a également indiqué que ses collègues avaient invité à respecter les droits de l'homme et le droit humanitaire international et à continuer de faire progresser le processus de paix de Linas-Marcoussis.
Par ailleurs, le Conseil a également pris note avec satisfaction de la déclaration faite le 11 avril par le Président ivoirien Laurent Gbagbo et exprimé son soutien au comité de surveillance établi par le nouvel accord de paix.
"Les membres du Conseil ont rappelé leurs intentions de se rendre bientôt en Afrique de l'Ouest et en particulier en Côte d'Ivoire", a conclu M. Zinser.

(Source : www.un.org)


LA DECLARATION DU PRESIDENT DU CONSEIL DE SECURITE SUR LA COTE D'IVOIRE

Les membres du Conseil se sont félicités de la signature d'un nouveau décret de délégation de pouvoirs au Premier Ministre ainsi que de la formation progressive du gouvernement de réconciliation nationale.
Les membres du Conseil ont exprimé leur sérieuse préoccupation quant aux récentes violations du cessez-le-feu en Côte d'Ivoire. Ils ont appelé toutes les parties prenantes à respecter les engagements qu'elles ont pris et à mettre fin immédiatement aux attaques, qui risquent de porter atteinte à la poursuite du processus de paix et de réconciliation. Ils ont à cet égard pris note avec satisfaction de la déclaration du Président Gbagbo en date du 11 avril et ont souhaité qu'elle soit suivie d'effets. Ils ont exprimé également leur vive préoccupation à l'égard du recours par les parties à des mercenaires, à d'autres éléments armés étrangers, au recrutement forcé, en particulier d'enfants, et leur ont demandé de mettre fin à ces pratiques.
Les membres du Conseil ont demandé à toutes les parties de respecter les droits de l'homme et le droit international humanitaire.
Les membres du Conseil ont appelé les parties à continuer de faire avancer le processus de Linas-Marcoussis et ont réaffirmé leur disponibilité à apporter un soutien aux efforts des parties prenantes dans la mise en œuvre de leurs propres engagements. Ils ont réaffirmé leur plein soutien au Comité de suivi.
Les membres du Conseil ont renouvelé leur soutien à l'action des forces de la CEDEAO et françaises. Ils ont appelé les donateurs à décaisser les contributions annoncées pour financer et, si possible, renforcer la force de la CEDEAO.
Les membres du Conseil ont marqué une nouvelle fois leur inquiétude quant à la situation humanitaire et ont appelé les Etats membres à répondre très favorablement à l'appel qui sera lancé à Abidjan et à Genève à la fin de ce mois.
Les membres du Conseil ont rappelé leur souhait de mener prochainement une mission en Afrique de l'Ouest, et notamment en Côte d'Ivoire.

(Source : www.un.org)


Attaques d'hélicoptères MI 24:
le conseil de sécurité demande à gbagbo de clouer ses hélicos au sol

Le Conseil de sécurité des Nations Unies a décidé de demander au gouvernement ivoirien de cesser d'utiliser ses hélicoptères de combat Mi-24 contre des localités contrôlées par les rebelles, a-t-on appris mardi de source diplomatique à l'Onu.
Cette décision a été prise lors de consultations à huis clos, a indiqué à l'AFP une source diplomatique ayant participé aux travaux.
Le président en exercice du Conseil de sécurité, l'ambassadeur mexicain Aguilar Zinser, a été prié "de rencontrer le représentant de la Côte d'Ivoire à l'Onu pour lui dire que le gouvernement ivoirien devait arrêter d'utiliser ses hélicoptères d'attaque".
Cette démarche doit être effectuée très prochainement, a précisé cette source.
Le Mouvement patriotique de Côte d'Ivoire (MPCI) a affirmé que des hélicoptères de combat des forces gouvernementales ivoiriennes avaient attaqué lundi et mardi plusieurs localités situées dans l'ouest du pays sous son contrôle, faisant au moins neuf morts.
Le porte-parole de l'état-major ivoirien, le lieutenant-colonel N'Goran Aka, interrogé par l'AFP, a cependant affirmé que ces Mi-24 n'avaient pas décollé lundi ou mardi.
L'emploi de ces hélicoptères, achetés par le gouvernement ivoirien après le déclenchement du conflit en septembre dernier, a été interdit par le Comité de suivi des accords inter-ivoiriens signés fin janvier à Marcoussis (France).
L'ambassadeur de France à l'Onu, Jean-Marc de La Sablière, a fait part lors des consultations de la "préoccupation" que causait à Paris "l'utilisation de ces hélicoptères pilotés par des mercenaires".
Le Conseil de sécurité, dans une déclaration lue par son président à l'issue des consultations, a "exprimé la grave inquiétude suscitée par les récentes violations du cessez-le-feu en Côte d'Ivoire" et appelé "toutes les parties à respecter leurs engagements et à mettre un terme aux attaques entravant la poursuite du processus de paix et de réconciliation".
Le Conseil de sécurité, a également indiqué l'ambassadeur mexicain, "est profondément inquiet du recours à des mercenaires, aux éléments d'armées étrangères, au recrutement forcé, notamment celui d'enfants, et demande aux parties d'y mettre immédiatement un terme".
Enfin, le Conseil a "renouvelé son appui aux forces françaises et à celles de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest"déployées sur le terrain pour faire respecter le cessez-le-feu et aider à l'application des accords visant à rétablir la paix.
Les soldats français en Côte d'Ivoire, a indiqué l'ambassadeur de France, sont actuellement 4.000. Depuis fin mars, ils ont laissé la surveillance de la ligne de feu aux forces de la CEDEAO (1.200 hommes).
"Les forces françaises restent prêtes à tout instant à renforcer celles de la CEDEAO si cela devait être nécessaire", a ajouté M. de La Sablière.

(Source : AFP)


Rapport du Secrétaire général de l'ONU sur la Côte d'Ivoire
KOFI ANNAN critique les médias ivoiriens

Le 26 mars 2003, le Secrétaire général de l'ONU, M. Kofi Annan était devant le Conseil de Sécurité pour présenter son rapport sur la crise en Côte d'Ivoire. Nous vous proposons la suite de ce rapport dont nous avons publié la deuxième partie dans notre édition d'hier, mercredi 16 avril.

Impact économique et social du conflit

58• Le conflit en Côte d'Ivoire a mis fin à la croissance économique que le pays a enregistrée pendant les trois premiers trimestres de 2002. Il convient tout particulièrement de mentionner les conséquences négatives pour le secteur agricole, pilier de l'économie ivoirienne, ainsi que l'inflation qui a récemment connu une hausse spectaculaire, les prix ayant considérablement augmenté, en particulier dans les zones contrôlées par les mouvements rebelles dans le Nord et l'Ouest du pays. Les exportations de coton (produit essentiellement dans le Nord du pays) sont interrompues, ce qui a une incidence sur les moyens de subsistance d'environ 2,5 millions de personnes. Toutefois, les effets sur les exportations de cacao, qui représentent 40 % des exportations totales de la Côte d'Ivoire, ont été limités du fait de l'augmentation des cours sur le marché international.

59• Les effets de la crise se font également ressentir sur les économies des autres pays de l'Afrique de l'Ouest, la Côte d'Ivoire étant la principale économique de la sous-région (elle représente 40 % du PIB de l'Union économique et monétaire ouest-africaine et 15 % du PIB de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest). Les pays les plus touchés sont notamment le Burkina Faso et le Mali, dont 70 % à 80 % du commerce extérieur dans la région se fait avec la Côte d'Ivoire ou passe par ce pays. Les frais de transport ont considérablement augmenté, ce qui rend encore moins compétitives les économies de ces pays. En outre, les pays de la sous-région ont subi d'énormes pertes sur les envois de fonds car un grand nombre de travailleurs migrants ont dû retourner dans leur pays d'origine.

Questions relatives aux droits de l'homme

60• La situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire a fait l'objet d'un rapport publié le 24 janvier 2003 par le Haut Commissaire adjoint aux droits de l'homme (S/2003/90, annexe). La mission d'évaluation a reçu des informations allant dans le sens de ce rapport et faisant état de voies de faits généralisés perpétrés sur les civils par les groupes armés. Depuis la publication de ce rapport, davantage de violations des droits de l'homme ont été enregistrées, notamment le pillage et la destruction de biens privés lors des manifestations violentes qui ont suivi la signature de l'Accord de Linas-Marcoussis, tout comme la recrudescence de la violence contre les médias, en particulier l'attaque des locaux du journal Le Jour et de la station de radio privée Nostalgie, ainsi que l'enlèvement et le meurtre le 26 février d'un acteur bien connu, Camara Yêrêfê, qui aurait été commis par des escadrons de la mort à Abidjan. Par ailleurs, plus de 60 villageois auraient été tués lors d'une attaque de mercenaires libériens à Bangolo le 8 mars.

61• Outre une présence limitée du CICR, il n'y a guère de moyens sur le terrain pour surveiller la situation en matière de protection des populations vulnérables et en rendre compte. La mission d'évaluation a noté que toutes les parties ont appelé à la mise en place d'une forte présence d'organismes chargés de surveiller le respect des droits de l'homme et la situation humanitaire sur le terrain. Parallèlement à cette présence, l'ONU devrait sensibiliser tous les groupes armés au respect des droits de l'homme et du droit internationale humanitaire et, par-delà, des Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur propre pays. Outre la surveillance du respect des droits de l'homme et l'information y afférente, tous les protagonistes sur le terrain devraient, dans leurs activités, s'employer à protéger les populations vulnérables, notamment les personnes déplacées et les réfugiés.

QQuestions relatives à l'information

62• Après les événements du 19 septembre 2002, de nombreux médias ivoiriens ont commencé à adopter un ton de plus en plus rhétorique, notamment en ayant recours à ce qui était généralement considéré comme des messages xénophobes, de la manipulation politique, des déclarations sans fondement et de l'incitation à la violence contre des individus ou groupes de personnes originaires de certains pays étrangers. La situation s'est quelque peu améliorée à la suite de la signature de l'accord de cessez-le-feu le 17 octobre 2002 et sous la pression de la communauté internationale, exercée notamment grâce aux contacts que mon Représentant spécial pour l'Afrique de l'Ouest a eus avec les parties dans le cadre des négociations en cours. Néanmoins, la teneur des informations diffusées par les médias demeure très violente et tendancieuse, ce qui atteste l'instabilité de la situation politique et continue de saper le tissu social du pays. Les attaques des médias visent maintenant les rebelles et toutes autres personnes qui ne sont pas considérées comme des patriotes, et plus récemment des objectifs politiques. Les médias et les gouvernements étrangers ont également été l'objet de vives critiques.

63• Les organismes des Nations Unies en Côte d'Ivoire et les représentants de la communauté internationale ont rapidement réagi, en faisant part de leurs préoccupations et en s'employant à atténuer les effets des messages xénophobes et de la propagande négative afin de créer un climat favorable à la promotion du dialogue et de la réconciliation. Face à la crise, un groupe de travail inter institutions des Nations Unies a élaboré un plan de communication visant à établir des liens plus étroits avec les médias ivoiriens et à mieux diffuser les informations revêtant une importance cruciale pour la population, en particulier en ce qui concerne les questions humanitaires. En outre, les organismes des Nations Unies ont appuyé les initiatives locales visant à diffuser, à travers les médias, des messages propres à promouvoir la réconciliation et l'harmonie.

64• S'agissant de l'interruption, depuis septembre 2002, des émissions locales diffusées en modulation de fréquence par Africa n°1, la BBC et Radio France Internationale ainsi que de celles de Radio Nostalgie, mon représentant spécial pour la Côte d'Ivoire a appelé l'attention des autorités sur les dispositions pertinentes de l'Accord de Linas-Marcoussis. C'est ainsi que Radio Nostalgie a repris ses émissions le 18 février 2003 tandis qu'Africa n°1, la BBC et RFI reprenaient les leurs le 28 février.

65• Le fait que nul n'ait manifestement à répondre des informations irresponsables diffusées qui caractérisent la situation actuelle atteste la nécessité de rechercher des moyens d'accroître l'efficacité des organismes nationaux de contrôle des médias, qu'il s'agisse de mécanismes relevant de l'Etat ou de ceux mis en place par les professionnels du secteur des médias, tout en garantissant le respect de la liberté d'expression. Il faudrait notamment appliquer des normes internationalement acceptables quant aux moyens de sanctionner l'incitation à la violence, à la haine et à la xénophobie. A l'heure actuelle, ni les structures d'Etat ni celles mises en place par les journalistes n'ont les moyens ou les ressources nécessaires pour s'acquitter efficacement de leur mandat.

Sécurité du personnel des Nations Unies

66• Conformément aux recommandations de l'Equipe de gestion de la sécurité des Nations Unies sur le terrain, la phase trois du plan de sécurité (transfert du personnel non essentiel et des personnes à charge hors du pays) est entrée en vigueur à compter du 17 octobre 2002. La phase quatre (limitation du rôle des Nations Unies aux programmes d'urgence et aux opérations humanitaires) est ultérieurement entrée en vigueur le 5 février 2003 de sorte que seulement 82 membres du personnel essentiel, travaillant principalement pour des organismes humanitaires sont restés dans le pays. Le Président Gbagbo a fait part à la mission d'évaluation de sa déception face à la décision de mettre en œuvre la phase quatre du plan de sécurité au lendemain de la signature des accords de Linas-Marcoussis. Il convient de noter toutefois que la mise en œuvre de ces mesures de sécurité a été motivée par les manifestations violentes consécutives aux accords de partage du pouvoir dit "Accord de Kléber".

67• La principale tâche qui s'imposait à l'Equipe de gestion de la sécurité au titre des phases trois et quatre a été d'assurer efficacement la sécurité des organismes humanitaires en activité partout dans le pays et de maintenir un réseau de communication fiable à Abidjan afin de tenir le personnel resté sur place informé de la situation en matière de sécurité sur le terrain. L'accord conclu avec les FANCI, les Forces françaises et le MPCI concernant un cadre pratique pour les habilitations de sécurité a quelque peu facilité les évaluations et les opérations humanitaires de part et d'autre des différents fronts, mais la libre circulation du personnel humanitaire dans tout le pays est indispensable à la poursuite des activités.

Impact économique et social du conflit

58• Le conflit en Côte d'Ivoire a mis fin à la croissance économique que le pays a enregistrée pendant les trois premiers trimestres de 2002. Il convient tout particulièrement de mentionner les conséquences négatives pour le secteur agricole, pilier de l'économie ivoirienne, ainsi que l'inflation qui a récemment connu une hausse spectaculaire, les prix ayant considérablement augmenté, en particulier dans les zones contrôlées par les mouvements rebelles dans le Nord et l'Ouest du pays. Les exportations de coton (produit essentiellement dans le Nord du pays) sont interrompues, ce qui a une incidence sur les moyens de subsistance d'environ 2,5 millions de personnes. Toutefois, les effets sur les exportations de cacao, qui représentent 40 % des exportations totales de la Côte d'Ivoire, ont été limités du fait de l'augmentation des cours sur le marché international.

59• Les effets de la crise se font également ressentir sur les économies des autres pays de l'Afrique de l'Ouest, la Côte d'Ivoire étant la principale économique de la sous-région (elle représente 40 % du PIB de l'Union économique et monétaire ouest-africaine et 15 % du PIB de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest). Les pays les plus touchés sont notamment le Burkina Faso et le Mali, dont 70 % à 80 % du commerce extérieur dans la région se fait avec la Côte d'Ivoire ou passe par ce pays. Les frais de transport ont considérablement augmenté, ce qui rend encore moins compétitives les économies de ces pays. En outre, les pays de la sous-région ont subi d'énormes pertes sur les envois de fonds car un grand nombre de travailleurs migrants ont dû retourner dans leur pays d'origine.

Questions relatives aux droits de l'homme

60• La situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire a fait l'objet d'un rapport publié le 24 janvier 2003 par le Haut Commissaire adjoint aux droits de l'homme (S/2003/90, annexe). La mission d'évaluation a reçu des informations allant dans le sens de ce rapport et faisant état de voies de faits généralisés perpétrés sur les civils par les groupes armés. Depuis la publication de ce rapport, davantage de violations des droits de l'homme ont été enregistrées, notamment le pillage et la destruction de biens privés lors des manifestations violentes qui ont suivi la signature de l'Accord de Linas-Marcoussis, tout comme la recrudescence de la violence contre les médias, en particulier l'attaque des locaux du journal Le Jour et de la station de radio privée Nostalgie, ainsi que l'enlèvement et le meurtre le 26 février d'un acteur bien connu, Camara Yêrêfê, qui aurait été commis par des escadrons de la mort à Abidjan. Par ailleurs, plus de 60 villageois auraient été tués lors d'une attaque de mercenaires libériens à Bangolo le 8 mars.

61• Outre une présence limitée du CICR, il n'y a guère de moyens sur le terrain pour surveiller la situation en matière de protection des populations vulnérables et en rendre compte. La mission d'évaluation a noté que toutes les parties ont appelé à la mise en place d'une forte présence d'organismes chargés de surveiller le respect des droits de l'homme et la situation humanitaire sur le terrain. Parallèlement à cette présence, l'ONU devrait sensibiliser tous les groupes armés au respect des droits de l'homme et du droit internationale humanitaire et, par-delà, des Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur propre pays. Outre la surveillance du respect des droits de l'homme et l'information y afférente, tous les protagonistes sur le terrain devraient, dans leurs activités, s'employer à protéger les populations vulnérables, notamment les personnes déplacées et les réfugiés.

INTERNATIONAL

De l'occidentalisme à l'impérialisme américain
Les Etats-Unis en conquérants du monde

L'impérialisme américain a été consacré avec la chute du régime de Saddam Hussein. Longtemps fondu dans l'occidentalisme qui fit les beaux jours de la colonisation en Afrique, il s'est affranchi de la vieille opposition occident-Union-soviétique. La chute du Mur de Berlin en 1989 et la disparition plus tard, de l'Union soviétique favoriseront "l'unilatéralisme", américain dénoncé dans la guerre en Irak. La notion de guerre préventive sortie de l'antre du clan Bush a fait le reste.
Les balbutiements de la construction de l'Union Européenne et plus tard ses faiblesses, allèrent offrir un terrain fertile pour l'émergence de l'hégémonie américaine. Face aux Etats-Unis, l'Europe s'est toujours présentée comme le pôle de prospérité et de réorganisation, consolidé par l'Euro (monnaie unique) et la mise en place effective d'une capacité autonome de défense. Mais, les contraintes d'une convergence en matière de politique économique et l'élargissement de l'Union, ont renforcé son repli sur soi, laissant les Etats-Unis occuper seuls, la scène internationale. C'est sur cette "autarcie", que se sont développées l'impuissance diplomatique de l'Union en matière d'intervention dans les crises et les guerres civiles, l'incapacité à construire un système de sécurité crédible sans la présence du tuteur américain.
Ce retard par rapport à l'Amérique est également lié à des contingences historiques. Lors de la seconde guerre Mondiale, le rôle joué par les Américains en Europe, notamment en France aura été déterminant. Aujourd'hui, la donne a changé. Les Etats-Unis font cavalier seul, aidés par la Grande-Brétagne et l'Israël.
L'ONU qui n'a pas réussi à empêcher la guerre en Irak est affaiblie après le bras de fer qui l'opposa à l'Oncle Sam. Incapable d'assurer l'ordre international par la paix, l'organisation mondiale devient marginale aux yeux des Américains. La puissance économique et la supériorité militaire américaine en imposent aux Nations-Unies et au reste du monde.
La France, l'Allemagne, la Russie et même la Chine qui symbolisent le camp de la paix n'ont pas réussi à ébranler la lourde machine va-t-en-guerre américaine.
Dans l'anti-chambre de la Maison blanche, les Faucons, avec en tête le Secrétaire d'Etat à la Défense, Donald Rumsfed, travaillent à maintenir ou à accroître l'hégémonie américaine dans le monde.
"L'axe du mal" décrit par Bush, avant la fin programmée de Saddam Hussein, pourrait servir de tableau de bord pour les prochaines conquêtes. Heureusement, l'Iran et la Corée du Nord ne représentent pas des "cas désespérés", comme l'Irak. Mais, il faut s'attendre à une extention de l'axe du mal à la Syrie et aux autres dynasties Saoudiennes. James Woolsey, ancien patron de la CIA, pressenti pour l'administration civile de l'après-Saddam Hussein, étale déjà les ambitions américaines : "Les Etats-Unis et leurs alliés se sont mis en marche. Ils viennent se ranger du côté du peuple, c'est-à-dire de ceux que les Moubarak et autres dynasties redoutent le plus".
La Syrie est clairement la première visée. Damas est accusée d'avoir poursuivi ses livraisons de matériels militaire, à l'Irak en guerre. Elle est également accusée d'héberger les dirigeants irakiens en fuite, les ennemis d'Israël, le Hamas, le Djihad Islamique et le Hezbollah. Autre contentieux lourd, la CIA, la soupçonne de cacher un arsenal d'armes interdites. La rapidité et l'aisance du succès militaire contre le régime de Bagdad renforce l'unilatéralisme dans lequel la guerre apparaît comme un lévier important de la politique étrangère américaine. La Syrie est donc avertie.

Assoumane Bamba

Moyen-Orient
La paix et la sécurité en questions

Vision trop idyllique que celle présentée par le président américain George Bush avant la fin du régime Saddam Hussein. A ses yeux, un changement de régime en Irak sèma les graines de la démocratie au Proche-Orient. "Une nouvelle étape pour la paix", "un progrès vers un Etat palestinien véritablement démocratique".
Bref la sécurité du peuple américain dépendait de la fin de la menace directe et croissante que représentait le président irakien pour George W. Bush, mais agir contre ce danger devait contribuer grandement à la stabilité du reste du monde.
Pourtant, en promettant la paix et la sécurité au peuple irakien, il est resté très flou sur l'avenir de l'Irak.
Washington est limité sur l'après-Saddam Hussein. Bush avait assuré que "les Etats-Unis n'avaient pas l'intention de déterminer la forme précise que prendra le nouveau gouvernement de Bagdad. Ce choix appartient au peuple irakien".
Cette réponse est apparue comme un aveu d'impuissance devant une possible désorganisation de la société irakienne. Il est probable que cette intervention militaire emmenée par Washington fabrique un Afghanistan bis où les tribus et autres groupes islamistes règneront en maître.
La promesse d'éradiquer le terrorisme mondial, en renversant le dictateur, se trouverait donc compromise par les effets pervers de cette guerre dont la Maison Blanche a dit qu'elle apporterait la liberté en Irak. Les scènes de pillage à Bagdad, Tikrit lors de la chute du régime et le "violent" débat sur la reconstruction du pays sont un éloquent langage sur les difficultés qui attendent les américains. James Wooksey, pressenti pour l'administration civile de l'après-Saddam Hussein aura à gérer la question Kurde, le problème Chiite et surtout la "menace" syrienne. Une position unilatérale américaine sur ces dossiers pourrait déstabiliser tout le Moyen-Orient.
En Syrie,les minorités religieuses ou non arabes constituent 35 % de la population ; en Irak, le nombre des Chiites s'élève à la moitié de la population et celui des Kurdes à 25 % ; à Bahrein, 60 % des habitants sont Chiites ; en Iran, les Sunnites ne sont que 15 % mais les populations non persanophobes plus de 40 %.
Les Kurdes (25 millions de personnes) vivent sur un territoire divisé entre l'Irak, l'Iran, la Turquie, la Syrie et même l'Azerbaïdjan avec, en plus, une nombreuse diaspora en Europe (Allemagne, Suède). Ils entretiennent une forte tradition politique et, depuis les années 1980, privilégient la lutte pour une autonomie dans le cadre de ces divers Etats.
La contrebande de produits agricoles, industriels, d'importation ou même d'armes est devenue la règle le long des frontières qui divisent ces populations.

A.B.



CULTURE

Producteurs d'œuvres musicales
L'émergence d'une nouvelle profession

Produire une œuvre musicale semble, a priori, facile. Pourtant, dès qu'on pénètre l'univers de la production, la réalité est tout autre. Entre l'espoir et le désir de faire fortune, ces hommes et femmes (producteurs) injectent souvent de fortes sommes d'argent dans la confection d'un album. Hélas, le succès n'est pas toujours au bout de l'investissement. Notre enquête.
Jadis réservée à un cercle restreint d'hommes et de femmes rompus aux rouages du Show-biz, la production n'est désormais plus l'apanage des "showbusinessmen". Mieux, des hommes d'affaires désireux de faire fortune, s'y investissent de plus en plus. On assiste ainsi à un véritable "boom" de la profession. Autant les œuvres fleurissent, autant les producteurs pullulent. Il faut noter que l'idylle de la plupart d'entre eux avec le milieu du show-biz naît parfois d'un coup de hasard, quelquefois d'une curiosité qui se mue en une passion. "Je suis venu à la production par curiosité. J'entendais régulièrement les artistes accuser leur producteur de les avoir grugés. Je me suis alors dit pourquoi ne pas me lancer dans le milieu afin de prouver que tout le monde n'est pas mauvais. Et un jour, j'ai rencontré l'artiste Joe Anoblé qui m'a dit qu'il cherchait un producteur. J'ai décidé de tenter l'aventure avec lui", se souvient Djama Lakp Jean qui a également produit "Les Garagistes" pour la sortie de leur œuvre "Les Titrologues".
Contrairement à Djama, c'est plutôt la passion qui a poussé Christian Kouassi, producteur du groupe "Fazolozo", dans la profession. "J'aime la musique depuis mon bas âge. J'écoute tous les genres : reggae, jazz, zouglou, etc. C'est ainsi que, quand les membres du groupe Fazolozo m'ont sollicité, après une brouille avec leur premier producteur, j'ai naturellement accepté", confie-t-il. Ce qui n'est, en revanche, pas le cas de Djédjé Franck Sylva, jeune homme d'affaires, venu de France, il y a environ trois ans. "C'est un simple coup du hasard", avoue Sylva qui produit un jeune artiste zouglou, du nom de Coco Hilaire. "Le but lucratif, poursuit-il, importe peu. Il faut que je sente mon produit". Certains producteurs se sont essayés d'abord au management avant de se lancer dans la production. Parmi eux, l'on peut citer, Angelo Kabila, qui a produit "1er Gaou" de Magic System. "J'ai débuté dans le milieu, raconte-t-il, comme "manager". J'ai "managé" le groupe Blacky's Tam-Tam. Puis, j'ai travaillé avec Tiken Jah et les Groove Makers. Quand j'ai rencontré Magic System, en 1999, j'ai assuré leur "management" avant de les produire". Au-delà du management, il y a le mécanisme de production d'une œuvre.

Mécanisme de production

Quand une œuvre est mise sur le marché, le mélomane est loin de mesurer le chemin parcouru, de la maquette au produit fini. Avant d'entrer en studio, le producteur doit être sûr des qualités de l'artiste. Car, de la mauvaise appréciation des qualités de chanteur d'un artiste, peut découler la mévente de l'œuvre. C'est pourquoi, avec minutie, certains privilégient le look, le charisme, les potentialités vocales de l'artiste. "Ce qui me séduit chez l'artiste, indique Franck Sylva, c'est la voix et l'émotion qu'il ressort quand il chante". Selon un autre producteur qui a requis l'anonymat, "un artiste, c'est un tout : la voix, le physique, le feeling, la manière de s'habiller". "Moi, j'ai une commission d'écoute. Quand je veux produire une œuvre, je la lui soumets. Lorsqu'elle juge que le produit est bon, je m'engage", renchérit Djama Lakp Jean. Avec les "anciens" artistes les producteurs sont moins exigeants. Après donc le choix de l'artiste, le producteur opte selon le type de musique et la sensibilité de l'artiste et l'arrangeur. Dans le milieu de l'Arrangement, deux têtes fortes se dégagent : Olivier Blé pour le zouglou et David Tayorault qu'on dit esthète du genre youssoumba. A côté d'eux, il y a Koudou Athanase, Joël Kangah qui sont aussi sollicités. Pour la mise sur le marché de l'œuvre, il y a deux types de contrats : le contrat standard où le producteur reverse cinquante francs CFA sur chaque cassette vendue à l'artiste et le contrat qu'on pourrait qualifier de particulier. Là, le producteur impose un taux de vente minimum avant de payer les royalties de l'artiste. Cela permet au producteur, d'amortir son investissement.

Les difficultés inhérentes à la production

"La production quand ça marche, les gens pensent qu'on se sucre sur leur dos. Mais, il y a plus de déboires que de succès", avertit un producteur chevronné. Ces propos traduisent, les péripéties du métier du producteur, car la confection d'une œuvre musicale engloutit beaucoup d'argent. "Un bon produit coûte en moyenne entre trois et quatre millions", révèle Christian Kouassi. Le producteur doit, en effet, assurer la location du studio, à raison de cinquante à soixante mille francs CFA la séance, les cachets des musiciens (instrumentistes et choristes), leur transport. De plus, il doit payer à l'arrangeur entre quatre-vingts et trois cents mille francs CFA pour chaque titre arrangé. Après la confection de l'œuvre, la phase de promotion intervient. Celle-là est plus cruciale, d'autant qu'elle exige le double voire le triple du coût de l'enregistrement. "Quand tu finis un album, c'est maintenant que le plus dur commence", clament en chœur les producteurs. "C'est l'étape la plus coûteuse de la production", fait remarquer Angelo Kabila. "La promotion nécessite beaucoup d'argent", affirme Djama Lakp Jean. Mais déjà, en prélude à la sortie de l'album, le producteur doit s'acquitter de la moitié du prix des stickers qui seront apposés sur la jaquette, qui coûtent vingt-cinq francs CFA, la pièce. Ensuite, le producteur s'attaque à la promotion proprement dite qui consiste à communiquer autour du produit. Ce qui inclut des spots télévisés (cent soixante-dix mille francs CFA, le passage), des spots radio diffusés (vingt mille francs, le passage). De plus, il doit batailler dur pour obtenir des prestations de l'artiste sur le plateau des émissions comme "Tempo", "Panache" ou encore "On est ensemble". Et comme si cela ne suffisait pas, le producteur doit gérer, de même, les exigences que d'aucuns qualifient de caprices, de son artiste. "Je veux que tu m'achètes une maison, une voiture reclament bien des artistes", lâche Franck Djédjé Sylva. Une attitude que déplore également Angelo Kabila : "L'artiste pense à un moment donné que tu es son père. Son loyer, ses factures d'eau et d'électricité, c'est toi qui dois les pays" Djama Lakp Jean, est, lui, plus amer. "Les artistes ne sont pas reconnaissants", regrette-t-il. Lui qui a souffert de la duplicité du groupe Aboutou Roots (après avoir pris une avance avec Djama, le groupe a finalement signé avec BYZ Production à Paris) ou encore de "l'insolence" du chanteur Eddie. De sa collaboration avec ce chanteur, Djama Lakp garde l'une de ses plus douloureuses expériences de producteur. "J'ai signé, se souvient-il, un contrat avec Eddie pour trois albums. Peu après, il revient me dire qu'il souhaiterait qu'on ramène le contrat d'abord à deux albums puis à un seul". Des difficultés qui contrarient sérieusement les producteurs la plus importante est la saturation du marché musical.

Trop de produits pour le consommateur

Guidés ou attirés par l'appât du gain, les producteurs ignorent que "le dernier mot revient au consommateur". Le succès de certains groupes (Magic System, Espoir 2000, Les Garagistes, Petit Denis, Petit Yodé et l'Enfant Siro, Soum Bill...) aidant, beaucoup de businessmen investissent, à fond, dans la musique. Un petit calcul suffit pour se rendre compte de l'ampleur de la situation. Show-biz sort, au minimum, par mois, vingt œuvres. Si on y ajoute ceux de la "Nouvelle Jat Music", de "CID Center", d' "Ivoir Top Music", de "Tropic Music" ou encore de "ABK Distribution", l'on atteint facilement les cent sorties mensuelles. Du coup, le marché est saturé. "A peine tu commences la promotion d'un produit, que des nouveautés sortent", souligne un producteur. Face à ce boom, des producteurs sont furieux. "Les gens se fouttent de notre métier, s'indigne Angelo Kabila. Parce qu'un ou deux produits ont marché, tout le monde se lance dans la production. C'est un métier difficile mais qu'il faut prendre très au sérieux. Je propose qu'on exige une licence pour être producteur". Comme lui, la plupart des producteurs souhaitent que la profession soit régie par des règles, afin d'éviter que "des aventuriers s'y glissent". Pendant ce temps, d'aucuns préviennent : "Il faut craindre pour l'avenir de la production". Surtout que la conséquence directe de cette saturation du marché est la mévente des albums. De plus, il faut compter avec les aléas de la vie. "C'est vraiment un métier risqué. Vous pouvez sortir une œuvre aujourd'hui et demain, voici un coup d'Etat. Comme la Côte d'Ivoire en connaît régulièrement. Et tout tombe à l'eau", souligne Angelo Kabila. Qu'à cela ne tienne, la production n'est pas qu'une aventure périlleuse. Elle est souvent source de bonheur, teintée d'images fortes.

Les bons points de la production

Bien que le milieu du show-biz, particulièrement celui de la production soit infesté de coups bas, tels que la fumisterie, l'hypocrisie, etc, la profession procure tout de même une satisfaction. "C'est un métier excitant. Tu es heureux de promouvoir la musique ivoirienne", avoue Angelo Kabila. Une satisfaction que partage également Christian Kouassi : "Je suis fier d'avoir aidé des enfants comme les Fazolozo". Quant à Djama Lakp Jean, il est, lui, moins euphorique. "Si tu n'es pas prêt à subir, à encaisser les insolences, il ne faut pas te lancer dans la production", conseille-t-il. Avant de reconnaître avoir éprouvé une réelle satisfaction quand Glazaï Dohoun Kévin a affirmé, sur le plateau de l'émission "Tonnerre" (diffusée sur la RTI Première chaîne) que "Djama Lakp Jean l'avait produit". "En général, il faut trois albums d'un artiste pour rentabiliser la production. Le premier sert à faire connaître l'artiste, le deuxième à amortir l'investissement fait et le troisième à le rentabiliser" expliquent-ils. Cela dit, tous reconnaissent qu'avec dix mille ventes, un produit est aussitôt rentable. Mais, certains utilisent une méthode dite de "compensation" pour tenir la cadence. "J'ai produit plusieurs artistes notamment Glazaï Dohoun Kévin, Arno Lest, Eddie... Mais le succès des Garagistes m'a permis d'éponger le déficit des autres productions. J'ai même pu faire des réalisations", soutient Lakp Jean. Comme on le voit, la production apporte souvent des bons points qui ne doivent pas faire perdre de vue les difficultés de ce métier. car, parfois, un producteur peut injecter douze millions dans un album et ne vendre que quelques centaines de cassettes. Quand c'est le cas, la désillusion est totale, pénible à surmonter. Pis, elle marque quelquefois à jamais, pour la vie.
C'est pourquoi, les producteurs nourrissent, dans l'ensemble, des projets de mise sur pied d'une grande structure de promotion et management. Entre-temps, la profession prend de plus en plus son envol. Pour le bonheur de l'industrie musicale.

Par Y. Sangaré

Concert "Terre des hommes"
Soum Bill en spectacle les 1er et 3 mai prochains

"Terre des hommes", la deuxième œuvre, en solo, de l'artiste zouglou, Soum Bill est sortie il y a quelques mois. Et Dieu sait quel succès elle a rencontré au sein de la population nationale et internationale. Malheureusement, l'artiste avait privilégié les prestations à l'étranger au détriment de la scène ivoirienne. Cette erreur sera réparée très bientôt. L'artiste, pour la première fois depuis son départ du groupe "Les Salopards", donnera deux concerts live comme tête d'affiche.
Ce sera le 1er mai prochain, jour férié (à cause de la fête du travail) à partir de 16 heures au Palais de la Culture à Treichville. Et le 3 mai, toujours à 16 heures, mais cette fois-ci, au Complexe sportif de Yopougon qui est devenu un lieu incontournable pour les "shows" à Abidjan.
Notons que Soum Bill appartenait au groupe zouglou "Les Salopards". Le groupe avait connu un franc succès. Mais, il a fini par se disloquer. Soucieux donc de perfectionner son art et de s'affirmer, Soum Bill sort son premier album solo "Zambakro" en 2000. Pendant la fameuse Transition militaire, il devient le consolateur des cœurs meurtris, des sans espoirs, des jeunes épris de liberté. Après cette œuvre il sort, en 2002, l'œuvre "Terre des hommes" pour une fois encore alerter le peuple sur les méfaits de la politique, de l'hypocrisie, de la jalousie et des autres maux de la société. C'est donc cet artiste aux talents intarissables que le public ivoirien verra en concert les 1er et 3 mai prochains.

Liliane Tiépokin



 

Contacts - Publicité - Abonnement

webmaster


Copyright © 2003 Le Patriote